Le PON, substrat minéral permettant de cultiver ses plantes selon la méthode dite de l’hydroponie «passive», s’est taillé une place de choix ces dernières années sur les réseaux sociaux et dans le cœur de nombreux plantaddicts. Je l’utilise moi-même depuis 3 ans (entre autres substrats) et je lui trouve de nombreuses qualités. Mais je suis également consciente des inconvénients de la culture en PON, ce qui me permet de l’exploiter au mieux.
Oui, le PON présente de nombreux atouts et facilite certaines choses, mais le prix à payer, c’est qu’il faut respecter certaines contraintes. Après tout c’est normal, on n’a rien sans rien n’est-ce-pas? Pourtant je trouve qu’on parle beaucoup plus de ses bons que de ses mauvais côtés, ce qui le rend hyper tentant.
Tu envisages de transférer certaines ou toutes de tes plantes en PON? Alors lis ce qui suit ! Je fais le tour pour toi des 6 grandes contraintes de la culture en PON. Et je me base pour cela sur ma propre expérience et pas sur du bla-bla. Comme cela tu pourras vraiment décider si oui ou non, le PON est pour toi (enfin, pour tes plantes).
Le PON : présentation
PON : si tu entends ce terme pour la première fois, tu te demandes sûrement de quoi je te cause. Qu’est-ce que le PON ? C’est un substrat minéral (inorganique ou inerte) composé de « petits cailloux », pour faire simple, et notamment de la zéolithe, de la pierre ponce (pumice) et de la pierre de lave (pouzzolane).
J’achète celui « prêt à utiliser » vendu par la marque Lechuza (le Lechuza-Pon) parce que je suis une fainéante, mais il est aussi possible de faire son propre mélange et de le personnaliser en fonction de nos conditions de culture (tu trouveras plein de recettes sur le net!).
C’est un substrat qui était (je trouve) très en vogue il y a 3 ans quand j’ai commencé. Tous les plantaddicts les plus en vue, qu’ils soient aux États-Unis ou en Europe (Pays-Bas, Allemagne, etc.) exhibaient des plantes rares dont les pots transparents étaient remplis de petits cailloux bleutés et beige. J’ai voulu à tout prix savoir de quoi il s’agissait et comprendre comment faire. Les avis étaient dithyrambiques : c’était apparemment le substrat idéal, rendant tout tellement facile! Même son de cloche sur le site de Lechuza, où le produit n’avait que des qualités et où tout paraissait si simple. Je me suis donc lancée. J’ai fait quelques erreurs, évidemment. Mais au fur et à mesure j’ai aussi acquis des connaissances plus théoriques sur l’hydroponie passive, la culture «indoor», les besoins des plantes etc.
Aujourd’hui j’ai l’impression que le PON n’a plus autant le vent en poupe mais souvent je croise quand même des plantaddicts qui pensent qu’il s’agit d’un super substrat parce qu’ils ont entendu que…., ou lu que….. Alors ils transfèrent d’un jour à l’autre «à la barbare» une bonne partie de leur collection en PON sans vraiment savoir ce que cela implique. Or, pour prendre une bonne décision et pour éviter une éventuelle déception, il faut avoir toutes les cartes en main. C’est pour cela que j’ai décidé de te donner ci-dessous les 6 principales contraintes de la culture en PON, à mon sens.
Contrainte n°1 : la température
Il s’agit à mon sens de la contrainte la plus importante, au prix actuel de l’énergie : la température ambiante. En effet, j’ai pu constater par moi-même, et aussi via l’expérience d’une amie dont les conditions de culture sont différentes, que les racines en PON sont relativement frileuses.
Autant autour de 26°C, j’ai observé une croissance de folie, autant en dessous de 19-20°C les racines font la tronche et le risque de pourriture racinaire est élevé. En cas de températures trop importantes, ce n’est pas l’idéal non plus, les racines qui baignent dans l’eau chaude auront également tendance à cuire.
En gros, la plage de température idéale se situera entre 19 et 26°C. Dès lors, si vous voulez cultiver en PON en France métropolitaine, il va falloir bien chauffer votre intérieur en hiver ou utiliser des tapis chauffants, ce qui dans les deux cas se traduit par des dépenses énergétiques coûteuses.
Contrainte n°2 : le prix
Les sous, le budget, le prix… c’est justement la deuxième contrainte à laquelle je pense spontanément. Alors évidemment, soyons réalistes deux secondes. La passion des plantes d’intérieur, à plus forte raison quand il s’agit de variétés rares et de collection, cela coûte cher dans tous les cas. Comme on m’a fait la réflexion une fois sur les réseaux, on n’est absolument pas dans la catégorie des dépenses indispensables. On est d’accord ! Et quand on est passionné(e) et qu’on veut le meilleur pour ses plantes, qu’on recherche l’optimisation à tous les étages, forcément, on trouvera toujours de bonnes raisons de dépenser.
Cela étant, je trouve vraiment que la culture en PON n’est pas la moins onéreuse (je n’ai pas toutes mes plantes en PON, j’utilise des substrats divers et variés donc je peux comparer).
Déjà il faudra acheter le PON lui-même, soit en version toute faite (coucou Lechuza!), soit en achetant séparément les différents composants. Dans tous les cas, disons que les vendeurs se font plaisir. Mais cela ne s’arrête pas là puisque tu auras ensuite envie de te simplifier la vie avec des pots à réserve d’eau conçus pour l’hydroponie passive. Il en existe de différents types alors forcément, on veut les tester. Ensuite, le PON est un substrat minéral inerte, ce qui veut dire qu’il faut apporter des nutriments à la plante, encore plus que dans un substrat organique « classique ». Il faudra donc acheter davantage d’engrais (spoiler alert, l’engrais c’est justement la troisième contrainte) et les accessoires qui vont avec (appareils pour mesurer le pH et la conductivité de l’eau, par exemple). J’inclus également l’électricité de chauffage puisque le PON ne fonctionne pas bien s’il fait trop froid dans votre pièce.
Contrainte n°3 : l’engraissage
Nous disions donc, au final le PON ce sont des petits cailloux et ceux-ci ne contiennent aucune substance organique, aucun nutriment pour nos plantes. Cela va donc être à toi de les apporter. Hors de question de prendre la question de l’engraissage à la légère !
Petite précision, le Lechuza-Pon classique contient de l’engrais censé durer 6 mois selon les indications du fabricant. Il s’agit d’un engrais osmocote (sous forme de billes qui vont se dissoudre lentement (en fonction de la température) et donc assurer une libération lente). Deux bémols : premièrement, ces billes d’osmocote sont relativement mal réparties dans le sachet (elles sont plus légères donc elles auront tendance à se situer dans le haut du paquet). Deuxièmement, sachant que l’osmocote se dissout en fonction de la température, s’il fait plus de 26°C, la quantité sera entièrement dissoute en trois mois maxi.
Personnellement, je fais donc comme s’il n’y avait pas d’engrais dans ce substrat. Depuis quelques temps, Lechuza vend une autre variété de PON appelée «Basicpon» qui ne contient pas d’engrais. Elle est du coup un peu moins chère. Depuis qu’il existe, je n’achète que ce PON, de sorte que la question de l’engrais qu’il contient ne se pose plus.
Parenthèse refermée, reparlons de l’engrais que tu vas devoir ajouter à ton substrat. Au moment du transfert en PON de la plante, j’ajoute un stimulant racinaire. Par la suite, je donne un engrais faiblement dosé en NPK lors de 5 arrosages sur 7 (oui, j’arrose tous les jours, et toujours par le dessus pour m’assurer de la bonne hydratation du PON). Et quand la plante est plus grande et plus établie, je donne un engrais un peu plus costaud, à la même fréquence. J’apporte également des compléments à mes plantes par voie foliaire, régulièrement. Contrairement à la culture en aroid mix, je ne peux pas compter sur le substrat et sa décomposition pour apporter «à manger à la plante».
Bref, tu as compris, l’engrais c’est une question primordiale pour la culture en PON. Ce qui nous amène directement à la quatrième contrainte
Contrainte n°4 : contrôle du pH et de l’EC
Bon, ça devient un peu plus technique mais il faut savoir que pour être correctement assimilé par la plante, l’engrais doit être associé à une plage de pH particulière (=le pH du substrat ou de l’eau). Pour la plupart des engrais minéraux, le pH en hydroponie doit être compris entre 5,5 et 6 (mais chacun a ses spécificités donc regarde sur le flacon, c’est marqué dessus). Du coup, si le pH de ton eau est à 8 parce que tu as pris l’eau du robinet et qu’elle est calcaire, ta plante ne pourra pas absorber l’engrais, et elle sera carencée à terme (et t’auras acheté de l’engrais pour rien).
Selon les indications du fabricant Lechuza, le pH du PON serait stable et il absorberait les nutriments pour les restituer aux plantes en fonction de leurs besoins. Il me semble que c’est essentiellement la zéolithe qui joue ce rôle de «tampon». Alors, en théorie c’est vrai, mais si tu arroses ton PON avec de l’eau très calcaire, je peux te garantir que l’eau ne changera pas de pH.
Tu vas donc devoir abaisser le niveau de pH de ta plante. Pour cela, entre autres, tu peux la filtrer (ou utiliser de l’eau de pluie), ajouter l’engrais liquide, peut-être du «pH down» et la réchauffer un peu. Et oui, le pH de l’eau varie en fonction de la température! Voici la contrainte de la température qui revient en force puisqu’elle aura un effet sur le pH de l’eau contenue dans le pot.
Bien sûr, pour vérifier ton pH il te faudra un pH-mètre et un peu de temps. À force de tester et d’expérimenter tu connaîtras le pH de ton eau d’arrosage et les mélanges à faire pour l’optimiser. Et si tu changes d’engrais, tu recommences et tu vérifies de temps en temps le pH.
Sans rentrer dans les détails, tu devras également vérifier l’EC (l’électro-conductivité), c’est-à-dire la quantité de sels minéraux dissous dans l’eau (sels issus de la dégradation de l’engrais que tu auras administrés) à l’aide d’un conductimètre. Car oui, si l’EC est trop important la plante n’ira pas bien du tout. C’est pour cela qu’il faut lessiver régulièrement le substrat en le passant sous l’eau tiède un moment.
Bref, tu vois un peu le niveau d’emmerdement, les manips et le budget. Si tout ça te barbe, le PON n’est pas pour toi.
(Attention, ce que je t’explique là, c’est si tu veux vraiment faire les choses au mieux. Après tout tu peux aussi te contenter de balancer de l’osmocote dans le PON tous les 6 mois et voir ce que ça donne).
Contrainte n°5 : les rempotages
Une chose est sûre, si tu gères à peu près bien, ta plante va te remercier avec une belle croissance. Pour elle le PON c’est un peu la vie de chateau. Le ratio eau/air du substrat est idéal, la croissance des racines est largement facilitée et on vient lui donner directement les nutriments dans le bec sans qu’elle ait besoin de dégrader quoi que ce soit pour y parvenir. Donc oui, les plantes en PON grandissent vite, pour peu que les conditions soient elles aussi favorables (température, lumière, humidité).
Et les racines quant à elles poussent extrêmement vite. À tel point qu’elles auront vite fait de traverser le «tamis» situé au fond de ton pot à réserve d’eau pour aller joyeusement envahir ladite réserve. Du coup le tarif c’est que tu dois rempoter très régulièrement (sur certains alocasia je devais le faire tous les 3 mois maxi) car lors du rempotage tu casses toutes les racines qui sont passées dans les trous du fond mais qui ont tellement grossi dans la réserve qu’elles ne peuvent plus faire le chemin inverse.
Alors ok, c’est pas la mort, mais c’est encore un truc de plus à faire. J’ai pu lire sur le net que certains se contentent de couper les racines comme ça elles mettent plus de temps à repartir. J’avoue que je n’ai jamais tenté.
Contrainte n°6 : l’adaptabilité
Et j’en arrive à la dernière contrainte ! J’ai appelé ça l’adaptabilité. Cela englobe deux transitions : la transition qu’il faut faire pour habituer la plante au PON au départ (chez les adeptes du PON (ça fait un peu secte non?) on appelle ça la «ponversion») et la transition ensuite pour passer du PON à un autre substrat.
J’entends par là que la ponversion nécessite le respect d’un certain processus et qu’il est possible que tu perdes une ou deux plantes en route, parce qu’elles ne supporteront pas ou parce que tu ne réagiras pas assez vite en cas de souci. De la même manière, si un jour tu te dis «mais j’en ai marre de ce truc, je veux repasser tout le monde en aroid-mix!», cela ne sera pas si facile. Les racines en PON sont moins ramifiées et moins fines que dans du terreau. Un transfert direct en aroid mix pourrait leur être fatal. Il te faudra souvent passer par une étape intermédiaire (de quelques semaines ou quelques mois) en sphaigne pour assurer un transfert réussi vers un substrat plus classique.
Le mieux c’est donc de bien réfléchir et de tester d’abord sur une plante avant de balancer toute ta collection de plantounes en PON. Tu me remercieras plus tard.
Conclusion
Alors voilà, le PON, c’est un substrat formidable, mais qui vient avec son lot de challenges. Si tu veux donner une chance à tes plantes de prospérer dans ces petits cailloux, voici ce qu’il faut garder en tête :
1. Température : les racines en PON sont un peu frileuses, donc assure-toi qu’elles ont leur température préférée entre 19 et 26°C. Cela signifie peut-être chauffer un peu plus ta pièce en hiver.
2. Prix : oui, ça peut représenter un investissement. Du substrat aux pots spéciaux, ça peut chiffrer. Il te sera difficile d’y échapper.
3. Engraissage : les graviers du PON n’apportent pas de repas à tes plantes. Tu devras jouer au chef cuistot pour leur fournir les nutriments dont elles ont besoin et te pencher un peu sur la question des engrais.
4. Contrôle du pH et de l’EC : un peu technique, mais important. Assure-toi que le pH est approprié et que tu ne noies pas tes plantes dans trop de sels. Un pH-mètre sera ton meilleur allié.
5. Rempotages : les racines poussent vite dans le PON, alors prépare-toi à des rempotages fréquents.
6. Adaptabilité : passer au PON et en sortir peut demander quelques ajustements. Prends ton temps et teste avec une plante avant de faire «all-in».
J’en rajoute une dernière pour la route : le PON c’est lourd. Si tu as de grosses plantes dans de gros pots ça peut devenir ingérable si tu n’as pas d’aide.
Allez j’ai fini ! Tu connais maintenant les petits défauts du PON, si on peut appeler ça comme cela! Si tu es prêt pour l’aventure PON, fonce! C’est un substrat très intéressant quand tes conditions de culture s’y prêtent.
Sinon, il y a toujours d’autres façons sympa de prendre soin de tes plantes 🙂